». Et ces innocents assassinés ? Pour ma part, si j’ai rappelé quelques détails de ces hideuses boucheries, ce n’est point par délectation morose, c’est parce que je pense que ces têtes d’hommes, ces récoltes d’oreilles, ces maisons brûlées. Au bout du capitalisme, désireux de se survivre, il y a Hitler. Comparaison idiote pour comparaison idiote : puisque le prophète de la Revue des Deux Mondes et autres lieux nous invite aux rapprochements « distants », qu’il permette au nègre que je suis de trouver - personne n’étant maître de ses associations d’idées - que sa voix a moins de rapport avec le chêne, voire les chaudrons de Dodone, qu’avec le braiment des ânes du Missouri. Le Discours sur le colonialisme est un pamphlet [1] anticolonialiste d’Aimé Césaire. C’est que l’entendement bourgeois est de plus en plus rebelle à la finasserie et que leurs maîtres sont condamnés à se détourner d’eux de plus en plus pour applaudir de plus en plus d’autres moins subtils et plus brutaux. », Convenait-il de refuser la parole au comte d’Herisson : « Il est vrai que nous rapportons un plein barils d’oreilles récoltées, paire à paire, sur les prisonniers, amis ou ennemis. Voire ! Le Discours sur le colonialisme … d’Aimé Césaire publié pour la première fois par Réclame, maison d’édition liée au Parti communiste français, le 7 juin 1950, avec une préface de Jacques Duclos. ». Quand on eut détruit, aux applaudissements des sages du temps, chacune de ces colonnes vivantes, l’édifice tomba par terre et les sages de nos jours cherchent encore comment ont pu se faire en un moment de si grandes ruines ! J’ai dit, - et c’est très différent, - que l’Europe colonisatrice a enté l’abus moderne sur l’antique injustice ; l’odieux racisme sur la vieille inégalité. Une civilisation qui choisit de fermer les yeux à ses problèmes les plus cruciaux est une civilisation atteinte. J’allais oublier M. Roger Caillois . Pas une goutte de sang ne sera perdue ! Le petit bourgeois ne veut plus rien entendre. La partie la plus troublée des colonialistes de Tananarive comprenait confusément l’essentiel de cette psychologie du sacrifice, et ils réclamaient leurs victimes. This version published by Monthly Review Press: New York and London, 1972. J’ai dit qu’il y a des vues juste dans le livre de M. Gourou : « Le milieu tropical et les sociétés indigènes, écrit-il, dressant le bilan de la colonisation, ont souffert de l’introduction de techniques mal adaptées, des corvées, du portage, du travail forcé, de l’esclavage, de la transplantation des travailleurs d’une région dans une autre, de changements subits du milieu biologique, de conditions spéciales nouvelles et moins favorables. Et la Banque de Madagascar ? Tout révolté est, chez nous, plus ou moins, un soldat qui a manqué sa vocation, un être fait pour la vie héroïque, et que vous appliquez à une besogne contraire à sa race, mauvais ouvrier, trop bon soldat. Une civilisation qui choisit de fermer les yeux à ses problèmes les plus cruciaux est une civilisation atteinte. « Cahier d’un retour au pays natal » a été suivi en 1950 par le « Discours sur le colonialisme ». Hérodote, ayant affirmé que les Egyptiens n’étaient primitivement qu’une colonie les Ethiopiens ; Diodore de Sicile ayant répété la même chose et aggravé son cas en portraiturant les Ethiopiens de manière à ne pouvoir s’y méprendre (Plerique omnes - pour citer la traduction latine - nigro sunt colore, facie sima, crispis capilis, livre III, 3), Il importait au plus haut point de les contrebattre. C’est le nazisme, ça passera ! Peine perdue ! En soi cela n’est pas grave. Vous connaissez la rengaine : « Les Nègres-sont-de-grands-Enfants ». Attendu, comme l’affirme son confrère en christianisme, le R.P. tue ! Mais descendons d’un degré. S’il y a mieux, c’est du R. P. Tempels. Les moralistes n’y peuvent rien. Cette muflerie, on la piste, depuis un siècle. Il y a l'affirmation du locuteur qui revendique sa négritude, qui est impliqué dans le combat. Un rude animal qui, par l’élémentaire exercice de sa vitalité, répand le sang et sème la mort, on se souvient qu’historiquement, c’est sous cette forme d’archétype féroce que se manifesta, à la conscience et à l’esprit des meilleurs, la révélation de la société capitaliste. Vrai ou pas vrai ? On me parle de progrès, de « réalisations », de maladies guéries, de niveaux de vie élevés au-dessus d’eux-mêmes. Versez cette dévorante activité sur des pays qui, comme la Chine, appellent la conquête étrangère. Je vois moins bien ce qu’elle a apporté. : You are free: to share – to copy, distribute and transmit the work; to remix – to adapt the work; Under the following conditions: attribution – You must give appropriate credit, provide a link to the license, and indicate if changes were made. », ces « il faut que ça saigne » éructés par le vieillard qui tremble et le bon jeune homme, élève des bons Pères, m’impressionnent beaucoup plus désagréablement que les plus sensationnels hold-up à la porte d’une banque parisienne. Aller à : Navigation, rechercher Le Discours sur le colonialisme est un pamphlet anticolonialiste d'Aimé Césaire, paru aux éditions Réclame en 1950, puis dans Présence africaine en 1955. L’auteur dénonce tous les actes de violence et de barbarie, la mise en esclavage de nombreux peuples et le pillage de leurs biens. », C’est clair, pour M. Yves Florenne, c’est le sang qui fait la France et les bases de la nation sont biologiques : « Son peuple, son génie sont faits d’un équilibre millénaire, vigoureux et délicat à la fois et... certaines ruptures inquiétantes de cet équilibre coïncident avec l’infusion massive et souvent hasardeuse de sang étranger qu’elle a dû subir depuis une trentaine d’années. Ce pamphlet qui—comme son nom l’indique—est une attaque claire contre le colonialisme a été réédité en 1955, après le début de la guerre d’indépendance d’Algérie. Eh bien, la voilà, la supériorité de l’Occident : « Cette discipline de vie qui s’efforce d’obtenir que la personne humaine soit suffisamment respectée pour qu’on ne trouve pas normal de supprimer les vieillards et les infirmes. En ce cas d’ailleurs, ils ne seraient pas une gêne, mais un avantage pour les dolicho-blonds... Il ne faut pas oublier que [l’esclavage] n’a rien de plus anormal que la domestication du cheval ou du bœuf. ces invasions gothiques, ce sang qui fume, ces villes qui s’évaporent au tranchant du glaive, on ne s’en débarrassera pas à si bon compte. Quoi donc, sinon celle de diriger le monde ? M. Caillois n’identifie pas autrement l’ennemi. 2009-2021 socialgerie Il reste, bien sûr, quelques menus faits qui résistent. En juin 1950, Aimé Césaire publiait un pamphlet qui fit scandale : "Discours sur le colonialisme" ⏪ Historique ′′ There is one thing against which the fight must never stop, I mean racism that is the very matrix of colonialism ′′ In June 1950, Aimé Césaire published a … Cette filiation, M .Yves Florenne la connaît. C’est très précisément cela qui donne une chance à M. Yves Florenne. Les routes ! ». Cheikh Anta Diop : Nations nègres et Culture, collection « Présence Africaine », 1955. De convenir de ce qu’elle n’est point : ni évangélisation, ni entreprise philanthropique, ni volonté de reculer les frontières de l’ignorance, de la maladie, de la tyrannie, ni élargissement de Dieu, ni extension du Droit ; d’admettre une fois pour toutes, sans volonté de broncher aux conséquences, que le geste décisif est ici de l’aventurier et du pirate, de l’épicier en grand et de l’armateur, du chercheur d’or et du marchand, de l’appétit et de la force, avec, derrière, l’ombre portée, maléfique, d’une forme de civilisation qui, à un moment de son histoire, se constate obligée, de façon interne, d’étendre à l’échelle mondiale la concurrence de ses économies antagonistes. Et de fait, ne voyez-vous pas avec quelle ostentation ces messieurs viennent de déployer l’étendard de l’anti-colonialisme ? Pour M. Caillois, le véritable Lévy-Bruhl ne peut être que le Lévy- Bruhl où le primitif extravague. Colonisation : tête de pont dans une civilisation de la barbarie d’où, à n’importe quel moment, peut déboucher la négation pure et simple de la civilisation. Il s'oppose aux actions violentes et criminelles commises dans les colonies, l'exploitation des peuples et le pillage des ressources. Qu’il s’appelle Renan, c’est un hasard. Je veux dire dont on ne réchappe pas tout à fait indemne. Discours sur le colonialisme Aimé CESAIRE Discours sur LE COLONIALISME Première publication éditions Reclame Quatrième édition. Cela sonne net, hautain, brutal, et nous installe en pleine sauvagerie hurlante. Pour ma part, si j’ai rappelé quelques détails de ces hideuses boucheries, ce n’est point par délectation morose, c’est parce que je pense que ces têtes d’hommes, ces récoltes d’oreilles, ces maisons brûlées, ces invasions gothiques, ce sang qui fume, ces villes qui s’évaporent au tranchant du glaive, on ne s’en débarrassera pas à si bon compte. Après avoir annexé la science, le voilà qui revendique la morale. Pour ma part, je fais l’apologie systématique des civilisations para- européennes. Des bronzes du Bénin ? Le Discours sur le colonialisme est issu d’un pamphlet qui date lui de 1950. La grande trahison de l’ethnographie occidentale, laquelle, depuis quelque temps, avec une détérioration déplorable du sens de ses responsabilités, s’ingénie à mettre en doute la supériorité omni latérale de la civilisation occidentale sur les civilisations exotiques. Alors, chers amis, de ce côté-ci, attention ! (Ça, c’est la mouture mystique.). Plus de crise sociale ! On dit : « Comme c’est curieux ! Moi, je parle de sociétés vidées d’elles-mêmes, de cultures piétinées, d’institutions minées, de terres confisquées, de religions assassinées, de magnificences artistiques anéanties, d’extraordinaires possibilités supprimées. Si nettement, si démentiellement imaginaire, qu’il n’est pas interdit de parler d’ingratitude monstrueuse, selon le type classique du Fidjien qui brûle le séchoir du capitaine qui l’a guéri de ses blessures. Et, en effet, voici, sur le plateau du journal Le Monde, bien sagement rangées, ses petites offres de service. AIMÉ CESAIRE – DISCOURS SUR LE COLONIALISME – TEXTE INTÉGRAL 1955. Et ça donne encore ceci (cette fois mouture littéraire) : « Je sais que je dois me croire supérieur aux pauvres Bayas de la Mambéré. Si toutefois la société future s’organise sur une base dualiste, avec une classe dolichoblonde dirigeante et une classe de race inférieure confinée dans la main-d’œuvre la plus grossière, il est possible que ce dernier rôle incombe à des éléments jaunes et noirs. Or, la vie qui révolte nos travailleurs rendrait heureux un Chinois, un fellah, êtres qui ne sont nullement militaires. Discours sur Ie colonialisme, it appeared just as the old empires were on the verge of collapse, thanks in part to a world war against fascism that left Europe in material, spiritual, and philosophical shambles. [1]. Tout le monde y gagne : grandes compagnies, colons, gouvernement, sauf le Bantou, naturellement. Cette attitude, humainement déshonorante, était fondée sur une aperception assez juste en gros des troubles émotionnels que traversait la population des hauts plateaux. Pensez donc ! Inoubliable, messieurs ! Aimé Césaire’s "Discourse on Colonialism" is a poignant exploration of the brutality, indifference, and dehumanizing effect of colonization on both colonizer and colonized. En somme, le métissage, voilà l’ennemi. L’heure est arrivée du Barbare. Que disait M. Massis ? [3] Cari Siger, Essai sur la Colonisation, Paris, 1907. Je lui sais presque gré de s’exprimer et de paraître au grand jour, signe. Fallait-il empêcher le maréchal Bugeaud de systématiser tout cela dans une théorie audacieuse et de se revendiquer des grands ancêtres : La violence ! L’Europe est indéfendable. Et Caillois-Atlas de s’arcbouter philantropiquement dans la poussière et de recharger ses robustes épaules de l’inévitable fardeau de l’homme blanc. Le Discours sur le colonialisme est un pamphlet [1] anticolonialiste d’Aimé Césaire. Il paraît que c’est tirer de vieux squelettes du placard. Et si on la leur donnait, ils ne sauraient qu’en faire.). Et qui s’indigne d’entendre un certain R.P. Bien entendu, l’humanisme ne perd point ses droits (nous sommes en Occident), mais entendons-nous : « Ce n’est pas en se perdant dans l’univers humain avec son sang et son esprit, que la France sera universelle, c’est en demeurant elle-même. Les colonisés savent désormais qu’ils ont sur les colonialistes un avantage. Discours sur le colonialisme. Pressons : M. Caillois n’est pas encore au bout de son palmarès. Plan du site Nous en publions ci-dessous le début, précédé d’une lecture publique par Antoine Vitez en 1989 à Avignon. Que chacun fasse ce pour quoi il est fait, et tout ira bien. Accueil > MARX - MOUVEMENTS COMMUNISTES > AIMÉ CESAIRE - DISCOURS SUR LE COLONIALISME - TEXTE INTÉGRAL (...). Rien ne manquera, pas même le célèbre fardeau de l’homme blanc. Nul ne nie la véracité de Balzac. Signe qu’elle se sent cadavre. J’avoue que, pour la bonne santé de l’Europe et de la civilisation, ces « tue ! Peut-être la science commandera-t-elle un jour de débarrasser la route de l’humanité de ces poids lourds, de ces impedimenta, que constituent des cultures arriérées et des peuples attardés, mais nous sommes assurés qu’à l’instant fatal la conscience de M. Caillois, qui, de bonne conscience, se mue aussitôt en belle conscience, arrêtera le bras meurtrier et prononcera le Salvus sis. Car enfin, M. Yves Florenne en était encore à fignoler des romans paysans, des « drames de la terre », des histoires de mauvais œil, quand, l’œil autrement mauvais qu’un agreste héros de jettatura, Hitler annonçait : Les Vietnamiens, avant l’arrivée des Français dans leur pays, étaient gens de culture vieille, exquise et raffinée. Partialité ? J’ai relevé dans l’histoire des expéditions coloniales quelques traits que j’ai cités ailleurs tout à loisir. Et dans cet ordre d’idées, je cite, à titre d’exemples (pris à dessein dans des disciplines très différentes) : Mais n’allons pas trop vite. Editions PRÉSENCE AFRICAINE, 1955Tous droits réservés, [1] Le Discours sur le colonialisme … d’Aimé Césaire publié pour la première fois par Réclame, maison d’édition liée au Parti communiste français, le 7 juin 1950, avec une préface de Jacques Duclos. J’ai honte à le dire : c’est l’humaniste occidental, le philosophe « idéaliste ». les nègres ! Mais des d’Elbée, des Marchais, des Pigafetta ! Barde assurer que les biens de ce monde, « s’ils restaient indéfiniment répartis, comme ils le seraient sans la colonisation, ne répondraient ni aux desseins de Dieu, ni aux justes exigences de la collectivité humaine » ? Cette obligation est incompréhensible pour le Malgache. Entendez que la grande finance américaine juge l’heure venue de rafler toutes les colonies du monde. C’est cette action, ce choc en retour de la colonisation qu’il importait de signaler. Alors, encore une fois, attention !L’américaine, la seule domination dont on ne réchappe pas. Notre Gourou est lâché ; ça y est ; il va tout dire ; il commence : « Les pays chauds typiques se trouvent devant le dilemme suivant : stagnation économique et sauvegarde des indigènes ou développement économique provisoire et régression des indigènes. Naziv izvornika: Discours sur le colonialisme: Autor: Aimé Césaire: Država: Francuska: Jezik: francuski: Vrsta djela: esej Smart People Should Build Things: How to Restore Our Culture of Achievement, Build a Path for Entrepreneurs, and Create New Jobs in America. C’est encore du Truman. Dans le Cahier d’un retour au pays natal, Césaire définit le mot « négritude » et parle de racisme tout comme dans Discours sur le colonialisme. Et alors, je le demande : qu’a-t-elle fait d’autre, l’Europe bourgeoise ? Au départ, ça peut paraître un peu pénible, mais à l’arrivée, vous verrez, vous retrouverez tous vos bagages. Le système de la civilisation antique se composait d’un certain nombre de nationalités, de patries, qui, bien qu’elles semblassent ennemies, ou même qu’elles s’ignorassent, se protégeaient, se soutenaient, se gardaient l’une l’autre. Ai-je besoin de dire que c’est de très haut que l’éminent savant toise les populations indigènes, lesquelles « n’ont pris aucune part » au développement de la science moderne ? « Le temps du vieux colonialisme est passé ». Discourse on Colonialism (French: Discours sur le colonialisme) is an essay by Aimé Césaire, a poet and politician from Martinique who helped found the négritude movement in Francophone literature.Césaire first published the essay in 1950 in Paris with Éditions Réclame, a small publisher associated with the French Communist Party (PCF). En 1956, après la révélation des crimes de Staline dans le rapport Khrouchtchev, il démissionne du PCF et fonde le Parti Progressiste Martiniquais (PPM). Dans la Tragédie du roi Christophe l’auteur met en valeur la soumission de la femme et un racisme latent, tout comme une envie d’égalité des « races ». En 1950, il publie Discours sur le colonialisme, texte qui oue un rôle considérable dans la prise de conscience des acteurs politiques et culturels de la décolonisation. Ceux qui, comme Ramadier, s’en barbouillent - à la Silène - la face ; Fonlup - Esperaber [4], qui s’en empèse les moustaches, genre vieux-Gaulois-à-la-tête-ronde ; le vieux Desjardins penché sur les effluves de la cuve, et s’en grisant comme d’un vin doux. Faites fonctionner l’oublioir ! direz-vous. Les ports ! Le pays de race étrangère devra redevenir un pays de serfs, de journaliers agricoles ou de travailleurs industriels. De convenir de ce qu’elle n’est point ; ni évangélisation, ni entreprise philanthropique, ni volonté de reculer les frontières de l’ignorance, de la maladie, de la tyrannie, ni élargissement de Dieu, ni extension du Droit ; d’admettre une fois pour doutes, sans volonté de broncher aux conséquences, que le geste décisif est ici de l’aventurier et du pirate, de l’épicier en grand et de l’armateur, du chercheur d’or et du marchand, de l’appétit et de la force, avec, derrière, l’ombre portée, maléfique, d’une forme de civilisation qui, à un moment de son histoire, se constate obligée, de façon interne, d’étendre à l’échelle mondiale la concurrence de ses économies antagonistes. Alors, n’est-il pas vrai, on comprendra que l’ennemi dont Lautréamont a fait l’ennemi, le « créateur » anthropophage et décerveleur, le sadique « juché sur un trône formé d’excréments humains et d’or », l’hypocrite, le débauché, le fainéant qui « mange le pain des autres » et que l’on retrouve de temps en temps ivre-mort « comme une punaise qui a mâché pendant la nuit trois tonneaux de sang », on comprendra que ce créateur-là, ce n’est pas derrière le nuage qu’il faut aller le chercher, mais que nous avons plus de chance de le trouver dans l’annuaire Desfossés et dans quelque confortable conseil d’administration ! Je parle de millions d’hommes arrachés à leurs dieux, à leur terre, à leurs habitudes, à leur vie, à la vie, à la danse, à la sagesse. C’est un cousin. Et la chicote ? Que l’on pille, que l’on torture au Congo, que le colonisateur belge fasse main basse sur toute richesse, qu’il tue toute liberté, qu’il opprime toute fierté - qu’il aille en paix, le révérend Père Tempels y consent. Caillois est en bonne compagnie. Après la supériorité scientifique et la supériorité morale, la supériorité religieuse. ». Variante du décor, mais c’est bien du même monde, c’est bien du même homme qu’il s’agit, dur, inflexible, sans scrupules amateur, comme pas un, « de la viande d’autrui ». De belles phrases solennelles et froides comme des bandelettes, on vous ligote le Malgache. Savoir l’apparition du rationalisme ou sein de l’Islam à une époque où la pensée occidentale avait l’allure furieusement prélogique. Mais descendons encore d’un degré. » Et on attend, et on espère ; et on se tait à soi-même la vérité, que c’est une barbarie, mais la barbarie suprême, celle qui couronne, celle qui résume la quotidienneté des barbaries ; que c’est du nazisme, oui, mais qu’avant d’en être la victime, on en a été le complice ; que ce nazisme-là, on l’a supporté avant de le subir, on l’a absous, on a fermé l’œil là-dessus, on l’a légitimé, parce que, jusque-là, il ne s’était appliqué qu’à des peuples non européens ; que ce nazisme-là, on l’a cultivé, on en est responsable, et qu’il sourd, qu’il perce, qu’il goutte, avant de l’engloutir dans ses eaux rougies, de toutes les fissures de la civilisation occidentale et chrétienne. Vrai ou pas vrai ? celle des faibles. Je ne m’étendrai pas sur le cas des historiens, ni celui des historiens de la colonisation ni celui des égyptologues, le cas des premiers étant trop évident, dans le cas des seconds, le mécanisme de leur mystification ayant été définitivement démonté par Cheikh Anta Diop, dans son livre Nations nègres et Culture - le plus audacieux qu’un nègre ait jusqu’ici écrit et qui comptera, à n’en pas douter, dans le réveil de l’Afrique [5]. Pour ce qui est de M. Mannoni, ses considérations sur l’âme malgache et son livre méritent que de lui on fasse grand cas. Le temps de rincer le sifflet, on vous l’étripe. Je vous avertis solennellement qu’à ce jeu, c’est votre carrière qui se joue. Et balaie-moi tous les obscurcisseurs, tous les inventeurs de subterfuges, tous les charlatans mystificateurs, tous les manieurs de charabia. Five years earlier, in 1945, black people from around the Et le filtre ne laisse passer que ce qui peut alimenter la couenne de la bonne conscience bourgeoise. Devant elles n’avaient de sens, ni le mot échec, ni le mot avatar. » Alors notre Gourou choisit de filer doux et d’omettre de préciser que, si le dilemme existe, il n’existe que dans le cadre du régime existant ; que, si cette antinomie constitue une loi d’airain, ce n’est que la loi d’airain du capitalisme colonialiste, donc d’une société non seulement périssable, mais déjà en voie de périr. Ce rappel indispose la Banque d’Indochine. Et c’est là le grand reproche que j’adresse au pseudo-humanisme : d’avoir trop longtemps rapetissé les droits de l’homme, d’en avoir eu, d’en avoir encore une conception étroite et parcellaire, partielle et partiale et, tout compte fait, sordidement raciste. Et quand le cadavre bafouille, ça donne des choses dans le goût que voici : « Il n’y avait que trop de vérité dans ce premier mouvement des Européens qui refusèrent, au siècle de Colomb, de reconnaître leurs semblables dans les hommes dégradés qui peuplaient le nouveau monde... On ne saurait fixer un instant ses regards sur le sauvage sans lire l’anathème écrit, je ne dis pas seulement dans son âme, mais jusque sur la forme extérieure de son corps. M. Mannoni diagnostique : « Le Malgache n’essaie même pas d’imaginer pareille situation d’abandon... Il ne désire ni autonomie personnelle ni libre responsabilité. Il est connu comme le grand poète de la « négritude ». Un sort particulier est fait à Mircea Eliade, pour avoir osé écrire la phrase suivante : « Devant lui, l’Européen a maintenant, non plus des indigènes, mais des interlocuteurs. Il est donc possible qu’il reparaisse dans l’avenir sous une forme quelconque. Discours Sur Le Colonialisme,Aimé Césaire ... 9_Comme autres textes il y a : Aimé Césaire, La Tragédie de roi Christophe Et Cahier d’un retour au pays natal.